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Zet’Joe

Zet’Joe

Ville : Bruges
Chef : Geert Van Hecke
Site web : https://www.zetjoe.be/nl/welcome/
Date de la visite : 13 novembre 2021

Conduits en autocar privé depuis Bruxelles jusque dans le centre historique de Bruges, les Membres du Club royal des gastronomes de Belgique ont pu se mettre en appétit grâce à une promenade culturelle conduite par l’Association royale des guides de Bruges, et ce, malgré le temps automnal, froid et humide, qui ne semblait pas effrayer les touristes venus en masse d’autres pays d’Europe. Une fois la visite terminée, ils se sont confortablement installés sur les banquettes et fauteuils de velours du restaurant Zet’Joe, richement décoré de tableaux d’artistes, où la brigade de salle, conduite par Mireille, l’épouse du Chef, les accueillit chaleureusement. Ils étaient là pour déguster des préparations de Geert Van Hecke toujours très actif dans ses cuisines ouvertes sur la salle.

Le vin de Champagne Lacourte-Godbillon, brut, bien frappé, procure, dès sa première gorgée un plaisir rafraîchissant et hydratant qui est le bienvenu après plus d’une heure de marche. On se sent bien. L’ambiance se crée, la discussion s’anime, le champagne, en se réchauffant doucement, développe ses arômes, les mises en bouche arrivent : gougères croustillantes à l’extérieur, fondantes et consistantes à l’intérieur ; doux maquereau titillé par une mirepoix de betterave acidulée et caressé d’une crème mousseuse aux herbes ; veau persillé en gelée sur un mélange légèrement vinaigré de lentilles fermes et carottes. Le ton est donné, c’est plutôt Chopin que Berg.

La première entrée est sobrement présentée dans un bol turquoise : des langues d’oursins flottent sur une très délicate gelée au goût profond de crustacés, et sont en partie couvertes d’une mousse aérienne aux langues d’oursins qui, elle-même, dissimule une huître pochée, dont la vivacité iodée est tempérée par quelques cuillérées d’œufs brouillés. Pas de croquant certes, mais une gradation très subtile de textures moelleuses, et surtout un superbe équilibre de saveurs douces et puissantes, dont la première bouchée impose le silence autour de la table, et la dernière, conduit à un soupir satisfait et déjà nostalgique des secondes précédentes.

Gelée de crustacés, œuf brouillé, mousse légère aux langues d’oursins (Barbuntini, Rias Baixas, Espagne, 2020)

En deuxième plat, une noble noix de coquille Saint-Jacques colorée à la plancha, presque translucide en son centre, s’acoquine avec un mille-feuille d’encornets et de chorizo, du riz de Camargue et un cracker à l’encre de seiche pour créer un nouveau jeu de textures, plus ferme et contrasté que celui du plat précédent. La sauce épicée et le chorizo procurent au plat une chaleur piquante longue en bouche, sans pour autant écraser la douceur de la Saint-Jacques. Le sommelier, Mr Filip, a judicieusement choisi un vin de Côtes du Rhône (Saint Péray, Cuilleron, 2018) pour exalter le plat.

Noix de coquille Saint-Jacques rôties, marbré d’encornets et chorizo, riz rouge de la Camargue, sauce épicée (Saint Péray, Côtes du Rhône, Cuilleron, France, 2018)

Il fallait l’audace et le talent d’un grand Chef pour proposer des foies de volaille, abats souvent délaissés de nos jours. Ceux-ci servaient d’ingrédient principal à un petit gâteau lisse, tendre, tremblant, au goût puissant, et qu’entouraient de petites girolles, des morceaux de ris de veau ainsi que des fragments de haricots verts, pour former, avec une sauce crémée aux champignons, un ensemble très sapide et équilibré, aux saveurs et couleurs automnales. Cette fois-ci le sommelier proposait un grand domaine situé au pied des Alpilles, celui de Dominique Hauvette, dont le vin singulier, racé et intense (« Le Roucas, » 2016), s’avérait un compagnon charmeur.

En plat principal, le lièvre est servi sous deux formes, en médaillons de filets très tendres, façon arlequin, et en effiloché des cuisses, façon royale – avec une tranche de foie gras poêlée. Les garnitures de saison – betterave, chicon, pommes, trompettes de la mort – et une purée gourmande aux truffes de Richerenches, complètent ce plat riche, classique, magnifiquement interprété et qui s’avérera plus digeste que des versions traditionnelles, probablement grâce à la sauce civet peu concentrée, aux notes végétales, et permettant au plat de garder une certaine légèreté. On ne quitte pas le sud de la France pour le dernier vin d’Éric Michel (Cros de la Mûre, 2016) qui galvanise le plat grâce à sa complexité aromatique de fruits rouges, ses tanins fins, et sa belle longueur en bouche.

Avant-cuisses de lièvre « à la cuillère façon Royale, » mousseline de pommes de terres, truffes noires de Richerenches (Cros de la Mûre, Domaine Michel, 2 Côtes du Rhône, France, 2016)

Les amateurs de noisettes, cacao et café sont comblés par le dessert jouant sur les trois saveurs torréfiées, et les textures de gelée fondante au café, de dentelle croquante caramélisée au chocolat, de sorbet crémeux aux noisettes, de mousse onctueuse au chocolat, d’écume éthérée au café, et de gâteau praliné, granuleux et moelleux.

Chocolat, café, noisette

Le Chef fait alors son apparition. Il est immédiatement salué par les applaudissements des commensaux et les félicitations chaleureuses du Brigadier du jour, et nous parle de ses produits, du lièvre notamment, avant de s’adonner à une séance d’autographes.

Afin de prolonger cet après-midi gastronomique, festif et convivial, l’un des Membres offre généreusement aux convives un dernier verre de Lacourte-Godbillon, avant de reprendre le chemin du retour à la tombée de la nuit.

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