Le Chef René Mathieu et sa brigade de salle, accueillent chaleureusement les Membres du Club royal des gastronomes de Belgique dans une salle du Château de Bourlingster surplombant la vallée. Malgré l’heure de retard des convives rien ne transparaît. Quant aux Membres, ils sont, pour beaucoup, dans l’expectative, n’ayant pour la plupart jamais dégusté de repas entièrement végétal auparavant.
Mises en bouche ludiques : la décoration de la table est en partie comestible avec ses feuilles à tremper dans un ketchup d’herbes sauvages. Il y a aussi cette quenelle de sorbet de lierre terrestre déposée sur un krupuk de tapioca et charbon végétal trônant sur une Granny Smith. Des radis à peine sortis du jardin, retrouvent un terreau comestible dissimulé sous un velouté de leurs fanes. La nature dans sa diversité continue de s’inviter dans les mises en bouche avec des feuilles d’alliaire, un bouillon d’épiaire, du forsythia solarisé, des fleurs des bois. Le Chef commente, explique. Il ne vit pas dans un « autre monde. » C’est « nous » qui ignorons une grande partie du monde dans lequel nous vivons.
La démonstration de l’imagination créative du Chef continue avec du fenouil décliné de plusieurs façons. Bulbe : cru en fins rubans, en tranche rôtie-caramélisée, en long chips. Feuillage : en bouquet et en poudre. Ensemble savoureux. Puis une feuille de consoude – au goût naturellement léger de poisson – en tempoura, un clin d’œil au fish-and-chips, avec ses aromates – citron confit, câpres, géranium – sa crème au tournesol fermenté, comme une mayonnaise, et quelques fragments de morilles. L’effet est bluffant. L’étonnement se poursuit avec cette association inhabituelle de deux produits de saison : l’asperge blanche du Luxembourg et la rhubarbe. La douceur de l’une tempère l’amertume de l’autre. Un jus de betterave accentue le contraste de couleurs de la présentation méticuleuse. Un faux beurre blanc à l’aspérule, lisse et délectable, fait oublier l’absence de beurre et apporte de la richesse au plat.
Le dernier plat est présenté sous une cloche de verre dans laquelle flotte une légère fumée qui embaume la salle. On découvre alors un gros tronçon de carotte maturée dans le sable pendant l’hiver, confite et glacée avec un jus végétal concentré brillant et n’ayant rien à envier à une glace de viande. Les goûts sont puissants et profonds. Sur un gril au centre de la table fument des brochettes d’un suave mille-feuille de fondantes pommes de terre tartiné de pesto aux feuilles sauvages.
Moment théâtral avec la présentation d’un bâtonnet glacé, sur un pot de bois dont s’échappe un brouillard aux parfums de fleurs de sakura et lilas pour recouvrir entièrement la table. Délicieux souvenir d’enfance que ce sorbet au cassis enrobé de chocolat noir et parfumé d’une pointe de réglisse. Conclusion tout en fraîcheur et délicatesse autour de la fraise et de la violette avant de sélectionner quelques mignardises parmi une imposante collection présentée sur chariot et accompagnant thés et cafés.
Le Chef et sa brigade de salle sont vivement complimentés par les convives conquis.
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