C’est une habitude depuis 2015 déjà : chaque année les Membres du Club royal des gastronomes de Belgique se retrouvent au restaurant Comme Chez Soi pour leur Assemblée générale. Mais les visites du Club sont plus anciennes ! Au début du siècle dernier, le restaurant Comme Chez Soi était répertorié dans le Guide Gourmand 1938 qu’éditait le Club de la Bonne Auberge (l’ancienne dénomination du Club royal des gastronomes de Belgique). À l’époque le guide garantissait « la bonne cuisine, mais pas la bonne humeur du patron. » Aujourd’hui nous avons non seulement la bonne cuisine, mais également la chaleureuse affabilité du patron et de son épouse.
Salle privatisée au rez-de-chaussée avec vue imprenable sur la cuisine au fond. Brigade de salle aux petits soins, notamment les anciens de la maison, Messieurs Duquesne et Buyse. Le Champagne Bollinger active les discussions déjà bien animées après la réunion de travail à l’étage. Passage à table ordonné : banquettes d’abord, chaises ensuite.
Poireau fondant en dégustation. Sa douceur contraste avec une sauce vinaigrée intense et l’ensemble stimule les papilles et met en appétit.
Pour sa première entrée, le Chef Lionel Rigolet a choisi l’huître plate européenne (Ostrea Edulis) élevée à Yerseke aux Pays-Bas dans la région de l’Escaut. Charnue, cuite délicatement, imbibée d’un coulis de chardonnay, son goût iodé est atténué par la présence d’endives confites et de shiitaké. Un toast avec une quenelle de crème aux algues, servi séparément, prolonge le goût marin de l’ensemble. Pour celles ou ceux qui n’apprécient pas les huîtres, les Brigadiers avaient prévu la fameuse sole au Riesling qui figure toujours au grand missel de la Maison presque centenaire.
On continue avec de grosses noix de coquilles Saint-Jacques de Dieppe, décortiquées le matin même, dorées, fermes, et douces. Un tartare très parfumé de crevettes est dissimulé sous un voile croquant saupoudré de curry rouge. Un bouillon au curry rouge peu pimenté crée l’union de la composition et laisse chanter les coquillages et les crustacés sous un air exotique.
Suit un assemblage de savoureux filet de sandre régulièrement marqué au gril, de céleri rave fumé et presque confit et d’une sauce ravigote chaude moutardée. On se demande à première vue comment cet ensemble tonitruant pourrait fonctionner mais la réponse est vite trouvée à la première bouchée. La sauce dans laquelle la câpre et la moutarde font bon ménage, et dont la vigueur est tempérée par le céleri, exalte le poisson. Le Pouilly-Fuissé (Château-Fuissé, Tête de Cuvée, 2018) servi en magnum, a l’attaque fraîche. Sa paisible rondeur contraste agréablement avec le côté légèrement sauvage du plat.
Contrairement au plat précédent, la composition du plat principal ne pose pas de question : ris de veau, truffe, et pomme de terre. Dès l’arrivée des assiettes la chaleur musquée de la truffe dont parlait Diane Ackerman envahit la pièce. Une fine pellicule croustillante forme la surface de la chair lobulée. Impeccablement dénervée, sa cuisson frise la perfection. Une merveille gourmande d’apparente simplicité que vient flatter l’opulence maîtrisée d’un vin de Haut Médoc (Château Sociando Mallet, 2015).
Intermède poétique par notre Membre Silvia Polidori qui vient de publier son deuxième recueil « Il soffio del vento » et nous déclame en trois langues un poème dédié à l’Amour.
Conclusion onctueuse et très, très, chocolatée, au cœur de laquelle on trouve un crémeux au concentré d’un jus issu du mucilage de cacao. Plaisir simple et intense, annonçant déjà la fin proche du déjeuner qui sera complété par thés, cafés, mignardises et quelques cognacs et armagnacs. Mais avant cet épilogue, le Chef et son épouse nous rejoignent et c’est l’occasion de les féliciter pour ce repas remarquable contredisant les conclusions de certains « intermédiaires culturels. »
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